Les tensions se sont accrues au sein de la droite américaine ces derniers mois, mais la semaine dernière a été particulièrement explosive. Lors de ce qui semblait être une édition charnière de l'AmericaFest de Turning Point USA, organisé quelques mois seulement après l'assassinat de son co-fondateur Charlie Kirk, le candidat républicain au poste de gouverneur de l'Ohio, Vivek Ramaswamy, a publiquement rejeté l'idée selon laquelle certains Américains sont plus « américains » que d'autres en raison de leur ascendance. Il ne s’agissait pas d’une critique de gauche, mais plutôt d’un reproche adressé à un public conservateur lors d’un événement conservateur. “Je pense que l'idée d'un héritage américain est à peu près aussi folle que tout ce que la gauche éveillée a réellement proposé”, a déclaré Ramaswamy lors de la conférence à Phoenix.

Il existe un contexte plus large pour cette intervention. Les fissures idéologiques au sein des politiques alignées sur MAGA se multiplient, certains commentateurs décrivant les premiers stades d’une « guerre civile » interne. L’un des points chauds a été celui des Groypers, vaguement définis comme des partisans ou des associés du militant d’extrême droite Nick Fuentes, connus pour promouvoir des politiques racistes basées sur le ressentiment et l’exclusion.

La question est donc de savoir pourquoi la droite américaine est de plus en plus divisée sur les questions d’héritage, d’identité et d’appartenance. La montée de la pensée « Heritage American », que Ramaswamy conteste directement, n’est pas un retour au conservatisme mais l’adoption d’une politique identitaire sous un autre nom. Cela déstabilise déjà la droite de l’intérieur.

Le message central de Ramaswamy est que l'identité américaine ne peut pas être classée selon l'ascendance : soit vous êtes américain, soit vous ne l'êtes pas. Être Américain, en ce sens, c’est hériter et souscrire à une tradition constitutionnelle, un héritage politique fondé sur la liberté, l’obligation civique et la loyauté patriotique envers la République. Cela a longtemps été la conception orthodoxe de l’américanité au sein de la tradition conservatrice. Il ne nie pas la réalité historique selon laquelle certains Américains peuvent retracer leur ascendance plus loin dans le pays que d’autres, mais il rejette l’idée selon laquelle une telle ascendance confère une plus grande légitimité politique.

Le fait que Ramaswamy se soit senti obligé d’exprimer cela avec autant de force est révélateur. Son intervention suggère que la pensée « patrimoniale » n’est plus une provocation marginale, mais suffisamment influente pour justifier le rejet du public.


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Cette division à droite confirme que la politique identitaire n’est pas seulement une idéologie de gauche. C'est une logique morale forte. Dans ce cadre, l’identité précède l’action, l’appartenance à un groupe confère une autorité morale et la politique devient une compétition à somme nulle entre les groupes. Ce qui est crucial, c’est que cette grammaire soit idéologiquement transférable. Une fois normalisé, il peut être adopté par tout mouvement qui pense d’abord dans une perspective identitaire. Le discours du « Heritage American » reflète ces hypothèses. L’ascendance est traitée comme une fatalité, la démographie comme une fatalité politique, et les griefs sont formulés à travers une perception de perte de statut. Il ne s’agit pas d’un conservatisme retrouvant ses racines dans lesquelles le patrimoine est compris comme une obligation plutôt que comme un droit, mais plutôt d’un conservatisme adoptant le cadre conceptuel de la gauche moderne.

Le nationalisme « patrimonial américain » est une politique identitaire traduite en termes racistes. Il maintient le principe « progressiste » selon lequel l’identité détermine la légitimité politique, mais se contente de remplacer une identité par une autre. Dans cette logique, un descendant du Mayflower confère une autorité à quelqu'un qui descend des Apaches ou des esclaves africains. La politique du sang n’est pas une alternative à la politique identitaire – elle en est la forme finale. Ironiquement, cela nécessite également le renversement des fondements de la république américaine inspirés par les Lumières : le droit, le consensus et les principes moraux universels. Les principes mêmes qui ont fait de la nation ce qu’elle est.

L’idée du « Heritage American » a approfondi le fossé entre les conservateurs institutionnels, les populistes et les factions identitaires. Les inquiétudes concernant l’influence extrémiste sur MAGA sont désormais presque sous la surface. Le vice-président JD Vance, en particulier, a fait face à une pression médiatique croissante ces derniers mois pour adopter une position plus ferme contre les Groypers, en particulier depuis qu'il a initialement refusé de réprimander publiquement Nick Fuentes après avoir proféré des insultes racistes contre l'épouse de Vance.

Dans une récente interview, Vance a clairement indiqué deux choses. Premièrement, l’identité américaine n’est pas statique mais cumulative, et une nation figée dans un temps ancestral contredit l’histoire et les pratiques américaines. Deuxièmement, il a abordé directement l'épisode de Fuentes, déclarant que quiconque attaque sa femme peut « manger de la merde ». La franchise de la réponse était révélatrice.

C’est exactement ce que produit la politique identitaire : une surveillance sans fin des frontières, une escalade entre factions et des tests de loyauté. Comme nous l’avons déjà vu à gauche, lorsque l’identité devient le principe directeur d’un mouvement, cela conduit à un ressentiment permanent, à une radicalisation interne et finalement à une fragmentation. Une politique qui définit l’appartenance comme un élément essentiel plutôt que comme une obligation ne peut pas soutenir un avenir partagé.

La véritable ligne de démarcation ne se situe pas entre les factions de droite, mais entre deux perspectives sur le monde. L'identité ethnique est considérée comme un destin. L’autre considère l’appartenance comme le fondement de l’alliance morale inspirée des Lumières de la Constitution américaine. Une société qui oublie de défendre l’appartenance sans faire référence à la race finira par être dominée et piégée par la race.

Jide Ehizele est critique culturel et auteur sur l'identité, la foi et l'appartenance.

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